mardi 4 décembre 2012

Lyon - Turin : contestations, réunions et application ?

Un peu malade et occupé à distraire un Parisien, je n'ai pas pu me rendre moi-même à la manifestation contre le projet de ligne LGV Lyon-Turin. Mais j'ai tout de même décidé d'en parler aux vues des événements.

Tout le gratin franco-italien s'est retrouvé à Lyon lundi 3 décembre. Enjeu de cette grande réunion : la ligne LGV Lyon-Turin. Contesté depuis plusieurs années par différents collectifs italiens et savoyards présents sur place, le projet a tout de même été signé par François Hollande et Mario Monti. Reste à débattre du financement de ce projet pharaonique de 26,8 milliards d'euros.

anti Lyon-Turin (© PIERRE AUGROS)

Barrages et CRS. Ils étaient partout autour de la Préfecture et des Brotteaux, bloquant ainsi l'accès aux automobilistes et aux piétions. Il faut avouer que recevoir deux chefs d'Etat impose quelques mesures de sécurité plutôt drastiques. Certes ennuyeux, mais pas de quoi révolter le conducteur ou le pédestre moyen. En revanche, c'est un véritable problème lorsque vous êtes un opposant au projet. "Une parodie démocratique et une journée de provocation", comme le dénonce Daniel Ibanez, farouche opposant savoyard du Lyon-Turin.

En effet, plusieurs opposants ont été retardés au cours de leur voyage "après de nombreuses interventions de la police pour les stopper tout au long du trajet" selon M. Ibanez. Certains ont même été arrêtés à l'issue de cette froide et longue journée d'opposition place des Brotteaux. Une situation qui a donc passablement énervé Daniel Ibanez et ses camarades, refusant ainsi "de se rendre en délégation au sommet présidentiel".

8,5 milliards pour le tronçon international

Il était également question de signature hier, car le projet est tout de même dans les tuyaux depuis 1991. Et il va peut-être enfin voir la lumière. Les ministres français et italiens des transports ont donc finalement apposés leur griffe en bas des premiers documents. Une avancée significative pour cet ambitieux projet qui végète depuis 30 ans. Pourtant, tout reste à faire, à commercer par le montage financier du projet. Première étape : payer le tronçon international qui coûte à lui seul 8,5 milliards.

François et Mario (© Bertrand Guay)
Cette partie la plus symbolique du chantier, réalisée main dans la main entre les Italiens et les Français, n'a pas encore commencé et pose d'ailleurs déjà problème, notamment au niveau financier. Touchés par la crise, les deux pays frontaliers sont en manque de liquidité et font désormais pression sur Bruxelles, en pleine préparation du budget européen 2014-2020. François et Mario demandent à l'Europe de payer 40 % de la facture du fameux tronçon, soit 3,4 milliards d'euros. Il ne resterait alors que 2,9 milliards pour l'Italie, et 2,2 milliards pour la France. Reste désormais à trouver le reste des 26,8 milliards. Un financement qui devra passer par l'Assemblée Nationale, ce qui est loin d'être gagné vu les recommandations de la Cour des Comptes.

L'ennuyeux rapport

Le 1er août dernier, c'est un rapport de la Cour des Comptes qui chiffrait le chantier à 26,8 milliards. Dans ce même rapport, les magistrats soulignaient les premiers dérapages financiers du projet, comme le budget des études et des travaux préliminaires, passé de 320 à 901 millions d'euros au fil du temps. Soulignant également que "d'autres solutions alternatives ont été écartées" pour les travaux. Un nombre de contrariétés suggérant un réel besoin de relancer le dossier selon "l'avis consultatif" de la Cour.
Des arguments qui posent de réels problèmes à ce projet transfrontalier qui sera soumis aux Parlements français et italiens. Les opposants de ce Lyon-Turin ont donc encore le temps de changer la donne en passant par les députés. Problème, et il est de taille, la majorité des députés rhonalpins, ainsi que le conseil régional, est largement en faveur du projet. Pourtant les opposants disposent - chiffres à l'appui - de solides arguments. Comme la baisse du trafic des camions dans les tunnels existants par exemple.

Des tunnels en baisse de fréquentation

L'équation est simple. Pour que le tunnel soit économique viable, il faut que le trafic soit important, donc plus qu'il ne l'est aujourd'hui. Or le trafic des poids-lourds ne cesse de diminuer dans les tunnels déjà existants (Fréjus et Mont-Blanc).

Le Tunnel du Mont-Blanc
Le tristement célèbre tunnel du Mont-Blanc voit en effet sa fréquentation stagner depuis 2005. Remis en service en 2002, le tunnel a repris un trafic "normal" en 2005 avec 1 602 camions/jour en moyenne. Une fréquentation qui ne gonfle pas du tout entre 2005 et 2011, passant donc de 1 602 à 1 660. Une très faible - et anecdotique - augmentation plutôt inquiétante. Idem du côté du Fréjus, où l'on compte 2 638 camions/jour en 2006 et 2 053 en 2010. D'autant qu'en 2006, le rapport annuel du tunnel du Fréjus soulignait une baisse de fréquentation de 29,27 % par rapport à 2004. L'année 2005 n'étant pas prise en compte car le tunnel a dû fermer deux mois à cause de l'incendie du 4 juin.

Le Lyon-Turin a encore - sur le papier ! - de beaux jours devant lui si on ajoute à cela le promoteur public chargé de conduire les études et les travaux. Basé à Chambéry et à Turin, ce promoteur aura largement gagné sa place dans ce grand mille feuilles administratif.

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