jeudi 21 février 2013

Se souvenir des Canuts grâce à une faute d'orthographe

Rue d'Ivry, à la Croix-Rousse, se trouve une charmante petite place où se trouve une place commémorative en l'honneur de la poétesse Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859). Petit problème : la faute d'orthographe. 


où qu'elle est la faute ?

Poétesse - il faut le dire - peu connue, Marceline Desbordes-Valmore est arrivée à Lyon vers 1820 selon sa fiche wikipédia (oui j'avoue ma source). Selon l'encyclopédie en ligne, elle publie divers recueils qui font des histoires avec son mari etc ... (allez sur sa page, c'est plus simple). Puis elle aurait cédé son activité théâtrale en 1832. Grand bien lui fasse.

Louis-Philippe, alors roi des Français, lui verse une pension. Sympa le cousin du régicide !
Mais, tout le monde connait les artistes : des râleurs de première catégorie. La preuve avec cette plaque :

Quand Lyon semblait morte et ne respirait plus
Quand le sang inondait cette ville éperdue
J'était là ... (1834)

 Je vous le dis, écrire une faute aussi grosse : ça fait mal. Bon, je ne suis pas le roi de l'orthographe mais là c'est violent. Comment la mairie de la Croix-Rousse a pu laissé passer une telle horreur ? Mystère.

Bref, revenons à notre brave Marceline. Car une question se pose bien : de quoi peut-elle bien parler en mentionnant le sang qui "inonde" la ville.

En 1834, la France - et Lyon - est dirigée par Louis-Philippe dans un régime appelé la Monarchie de Juillet, puisque mis en place en juillet 1830. Mais 1834, c'est surtout la révolte des Canuts. Pour rappel, et comme l'explique Francis Démier :
"à Lyon, où tous les ouvriers se sont lancés en février 1834 dans une grève générale qui a tourné court, la Société des droits de l'homme; associée au conseil exécutif des ouvriers mutuellistes, lance une grande manifestation le 9 avril, veille de la promulgation de la loi qui vise les sociétés républicaines. Cette manifestation se transforme en une nouvelle insurrection qui est écrasée en quelques jours (9-12 avril 1834)."   La France du XIXe siècle, Paris, Le Seuil, coll. Points, 1996, pp. 130-131

Voila comment la collectivité utilise une obscure poétesse, en orthographiant mal ses mots, pour que les Lyonnais se souviennent des Canuts, sans les mentionner pour autant !
Magique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire